Le but de cet article n'est pas de discuter des causes de la crise vénézuelienne, du rôle de la CIA ou de la responsabilité de l'opposition dans les violences.
Il s'agit ici de faire une critique de la constituante vénézuélienne, au regard d'exigences démocratiques.
L'annonce d'un processus constituant populaire devrait être une nouvelle réjouissante pour le démocrate radical que je suis.
Pourtant, le processus constituant lancé par Maduro au Venezuela souffre de dérives inquiétantes.
Une jeune constitution
L'actuelle constitution date de 1999, moins de 20 ans, elle est l'aboutissement du travail d'une assemblée constituante élue, largement chaviste (95% des 131 membres). Il est difficile d'imaginer qu'une constitution si jeune soit déjà caduque. Le Venezuela traverse une crise politique & économique. Mais une crise institutionnelle ? Une constitution devrait être le socle stable sur lequel se déroule le jeu politique. Les règles du jeu ne devraient pas être changées en période de crise, dans l'urgence : On ne change pas le plan d'évacuation durant l'incendie.
Échec du référendum révocatoire
Parmi les procédures vertueuses introduites dans la constitution de 1999, on trouve le référendum révocatoire : Un puissant contre-pouvoir, éminemment démocratique. L'opposition n'est pourtant pas parvenue à déclencher ce référendum, les autorités electorates ayant suspendu la collecte des signatures, pour soupçon de fraude.
Difficile de ne pas voir dans ces revirements administratifs une volonté pour le gouvernement de "jouer la montre".
Un référendum révocatoire aurait pourtant permis à Maduro, le cas échéant, d'assoir sa légitimité pour le reste de son mandat.
Cet épisode ne marque pas tant la faiblesse de la constitution actuelle, dotée de contre pouvoirs puissants, que le manque d'indépendance des organes responsables du fonctionnement de ces outils.
Une assemblée sans opposition
L'opposition ayant boycotté l'assemblée constituante, elle n'est représentée par aucun des 545 membres : un manque dommageable pour la représentativité de cette assemblée.
L'utilisation d'une part de tirage au sort dans le mode de désignation aurait permis de mitiger ce biais.
Une assemblée toute puissante
A peine installée, l'assemblée constituante, dotée de pouvoirs exécutifs, a limogé Luisa Ortega, procureure chaviste et adversaire de Maduro. Comment une assemblée constituante peut elle avoir un tel pouvoir ? Comment espérer bâtir un système démocratique en violant le principe fondamental de la séparation des pouvoirs ? Une assemblée constituante ne devrait avoir aucun pouvoir législatif, exécutif ou judiciaire, mais se contenter de réécrire la constitution en parallèle de l'exercice normal de la constitution précédente.
La constituante part sur des bases malsaines, et des objectifs flous. Espérons que le référendum nécessaire à toute ratification protégera les vénézuéliens de potentielles dérives